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C'est quoi, une chronique ?

Dernière mise à jour : 1 janv. 2023

Étymologie et définition

Emprunté du latin chronica, le mot « chronique » tire son origine du grec ta khronica (biblia) qui signifie « les annales ».

D'après la définition qu'en donne le Dictionnaire de l'Académie française (9ème édition), il s'agit - dans son acception première - d'une « histoire rédigée en suivant l'ordre du temps », ou encore d'une « histoire événementielle, réelle ou imaginaire, d'un pays, d'une province, d'une ville, d'une famille, d'un individu, etc. »

La chronique suppose donc la rédaction d'une histoire suivant un ordre chronologique.


Origines des chroniques en Europe

Définir une origine des chroniques relève de l'utopie. Leur rédaction remonte très loin dans l'Histoire. En effet, depuis la Préhistoire, l'homme a toujours ressenti le besoin de dessiner, conter ou compiler les événements qu'il a rencontrés dans sa vie. Les peintures rupestres, les chansons de gestes et les représentations artistiques furent ses premiers supports de transmission jusqu'à ce que l'écriture les remplace.


Lors, la rédaction de chroniques universelles, compilation ou récits complets de « l’histoire universelle » mêlant à la fois l'histoire et la religion, a abondé même si la plupart des écrits ont aujourd'hui disparu. Il en est ainsi de la première chronique universelle écrite dans l'Antiquité gréco-romaine par Éphore de Cumes (≃ 400 - ≃ 330 av. J.-C.) qui couvrait pas moins de sept siècles d'histoire. Si son œuvre fut perdue, nous la connaissons car elle fut largement reprise par l'historien grec Diodore de Sicile (≃ 90 av. J.-C. - ? ) dans sa Bibliothèque historique sur laquelle il travailla pendant trente ans.


D'autres chroniques anciennes sont reconnues dans le monde historiographique comme le Chronicon de Saint-Jérôme (≃ 347 – 30/09/420), qui fut lui-même la traduction latine de la seconde partie de la Chronique d'Eusèbe de Césarée (≃ 265 – 30/05/339) – les Canons chronologiques - complétée de 325 à 378 par Saint-Jérôme. C'est à partir du Chronicon que l'engouement pour ce genre naquit et la fin du Moyen-Âge vit ainsi une abondante production de chroniques. D'après Hervé Inglebert, historien et professeur d'université, « environ 200 textes médiévaux latins relatent, plus ou moins complètement, l’histoire du monde depuis la Création ou l’Incarnation, dont les deux-tiers sont postérieurs à 1150 »1. Il ajoute cependant que l'on peut « réduire ce nombre en constatant que certaines « chroniques universelles » sont en fait locales (cas des chroniques centrées sur une entité particulière : ville, monastère, région, dynastie, peuple, pays) », comme par exemple les Chroniques de la ville de Metz (900-1552).

Durant l'époque médiévale, les chroniques étaient parfois écrites collectivement, souvent par les moines des grandes abbayes qui y relataient tous les faits importants survenus au cours du règne de tel pape ou de tel roi. Elles servaient d'ailleurs également à retracer la généalogie de ceux-ci ou encore à mémoriser les dons et les achats liées aux possessions religieuses. Citons ainsi les Chroniques de Saint-Denis, rédigées en latin par les moines de l'abbaye de Saint-Denis entre 1401 et 1500, qui retracent toute l'histoire des rois de France. Plus précisément, il s'agit d'un ouvrage compilatoire qui regroupe des chroniques latines qui furent réunies à l'abbaye de Saint-Denis puis complétées au xiiième siècle. Un siècle plus tard, une version enrichie et traduite en français apparut sous le titre des Grandes Chroniques de France.


Une page illustrée des Chroniques de Saint-Denis

(Source : gallica.bnf.fr/ Bibliothèque nationale de France. Département des manuscrits. Français 6465)

Mais on trouve également des chroniques rédigées de façon individuelle comme celles de Jehan Froissart (1337-1410) qui, au XIVème siècle, tenta de relater la première moitié des événements qui se sont déroulés durant la Guerre de Cent Ans.


Parmi les plus belles et les plus anciennes éditions retrouvées, nous pouvons citer Le Lectionnaire mérovingien. Il s'agit d'un manuscrit enluminé daté d'environ 700, le plus ancien conservé à la bibliothèque humaniste de Sélestat, en Alsace. Il est composé dans sa première partie d'un lectionnaire (textes liturgiques destinés à être lus pendant les cérémonies religieuses) et dans la seconde d'une véritable chronique universelle dont certaines sources attribuent le texte original à Saint-Jérôme.


La Weltchronik (Chronique du monde) de l'humaniste Hartmann Schedel (1440-1514), dite également Chronique de Nüremberg, fut connue au XVème siècle pour être le livre le plus richement illustré jamais édité en Europe.


Quoique les anciens manuscrits soient aujourd'hui d'accès assez rares, on trouve de nombreux exemples de chroniques historiques, qu'elle soient universelles ou locales. Bien entendu, elles ne se limitèrent pas à l'Europe.


La chronique « moderne »

Aujourd'hui, la chronique n'est plus réservée au seul domaine historique. Avec le temps, le terme a acquis d'autres acceptions. Elle caractérise aussi une rubrique de presse (écrite ou audiovisuelle) consacrée à l'actualité dans un domaine particulier (littéraire, politique, sportive, judiciaire, etc.)

Et si la généalogie n'a pas été la première à juxtaposer les mots « chronique » et « familiale », c'est bien l'un des domaines où, depuis quelques années, l'expression est le plus en vogue.


Pourtant, j'ai beau chercher sur Internet, je n'y ai trouvé aucune définition concrète. En revanche, plusieurs d'entre vous se demandent de quoi il retourne exactement.

Il s'agit en fait de rédiger l'histoire d'une famille complète, sur plusieurs générations, en y intégrant non seulement les événements vécus par ses différents membres mais en restituant toute leur histoire dans un cadre social, politique et historique à l'échelle tant microsociale (environnement direct de l'individu) que macrosociale (événements nationaux et mondiaux, …).


Bien entendu, une chronique familiale est ce que l'on décide d'en faire : elle peut être limitée à un certain nombre de générations, aux sosa2, aux événements strictement familiaux, ou, à l'inverse, être la plus exhaustive possible et ce, dans tous les domaines.

Pour autant, il faut avoir conscience que rédiger ce type de chronique est très chronophage par le temps de rédaction qu'elle demande mais aussi et avant tout par les recherches qu'elle génère dans toutes les sphères.


1 INGLEBERT Hervé, « Chapitre 17 - Les conceptions de la chronique universelle durant les derniers siècles du Moyen Âge occidental (xie-xve siècles) » dans : Le Monde, l’Histoire. Essai sur les histoires universelles, sous la direction de INGLEBERT ervé. Paris cedex 14, Presses Universitaires de France, « Hors collection », 2014, p. 513-552. URL : https://www.cairn.info/le-monde-l-histoire--9782130631286-page-513.htm


2 Un sosa est un terme généalogique qui désigne un ascendant direct. Il est issu de la numérotion Sosa (ou numérotation de Soza-Stadonitz), une méthode généalogique aujourd'hui très largement utilisée, qui attribue un numéro unique à un individu dans une généalogie ascendante. Par principe, l'individu racine (celui à partir duquel remonte la généalogie), également nommé de cujus, est le sosa n°1.

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